La Brouette Coop

Reportage sur la Brouette Coop l'habitat partagé créateur de lien social en Meuse. 12 minutes à lire, Publié par Rony Dray le 21 juin 2018
Dans la catégorie Habitat-Partagé
#potager, #habitat, #brasserie

Naissance de la Brouette Coop

Chaque lieu alternatif a sa spécificité, pour la Brouette Coop c’est le lien social. À mes yeux c’est un “métier à tisser” de liens entre individus. Parti de rien Baptiste et Mathieu avaient comme projet en août 2014 de créer, avec l’aide d’amis et de woofers, un lieu de vie où chacun trouve sa place.

Pour ce faire ils ont acheté deux terrains, un non constructible et l’autre avec une veille maison inhabitable qu’il fallait rénover presque entièrement. Le tout uniquement avec des fonds propres, sans subvention et sans prêt. Très important de garder son indépendance vis-à-vis des banques.

Une fois toute la paperasse signée, ils entamèrent les travaux. Mais l’hiver approchant les conditions de vie devinrent plus rudes et habiter dans des tentes et sous un barnum c’est pas évident quand il neige. Cependant la motivation est toujours là et ce n’est pas le froid qui va les arrêter.

Le premier gros chantier fut la toiture, il fallait absolument refaire une grosse partie du toit afin d’améliorer l’isolation et éviter les fuites. Puis pour sortir des tentes et gagner en confort, ils ont aménagé des chambres et des toilettes sèches à l’étage et une salle de bain avec une douche au rez-de-chaussée.

Troisième étape, la création de la brasserie. Comme tout amateur de bière Baptiste et Mathieu brassaient avant même l’achat de la maison. Le but de cet achat c’était aussi de pouvoir se professionnaliser et d’augmenter les volumes de production. Pour ce faire ils se sont associés à Martin et ont commencé l’aménagement de la brasserie.

On se retrouve maintenant avec trois amis sous le même toit :

  • Baptiste ancien agronome passionné d’élevage.
  • Mathieu plombier frigoriste (un gros plus pour l’activité brassicole)
  • Martin avec un parcours atypique : Il a commencé avec des études de langue suivi d’une école d’ingénieur pour finir avec une formation en permaculture.

Une belle diversité qui permet à chacun d’apporter son savoir faire et son expérience au projet.

Une fois le gros du chantier terminé il a pas fallu beaucoup de temps pour que de nouveaux colocataires s’installent sur le lieu. Pour les accueillir et les héberger diverses constructions ont été réalisées.

Avant même l’arrivée des colocataires des jardins avaient commencé à voir le jour sur le terrain.

Récolte de la première année pour 3 personnes
Récolte de la première année pour 3 personnes

Mais l’aide des nouveaux a permis d’améliorer l’extérieur avec la création de deux poulaillers et de deux serres, l’une pour les semis et l’autre pour la production de légumes. L’idée étant d’être auto-suffisant en légumes et aromates (28 variétés de menthe, du génépi, 8 variétés de thym, lavande, verveine et j’en passe) et par la suite de produire leur propre viande grâce aux moutons et aux poules.

Sans oublier les ruches qui pour l’instant se renforcent. Aucun miel n’est prélevé afin que les abeilles puissent procréer et se nourrir sans problème. La Brouette Coop propose même de venir récupérer des essaims gratuitement chez vous où dans les alentours du village.

Les belles ruches de la Brouette Coop
Les belles ruches de la Brouette Coop

L’activité brassicole devenant importante le trio a décidé de séparer la brasserie de l’association Brouette Coop qui est plus orientée accueil, animation et pédagogie.

La Mandale (SARL) est née, elle se décline en 3 couleurs : blanche, blonde et brune.

La Mandale, bière bio et locale
La Mandale, bière bio et locale

Elle ne se vend que sur place, c’est une bonne bière locale appréciée par tous les Chaillonnais et villageois aux alentours.

La Mandale est une entreprise et la Brouette Coop une association mais cela ne les empêche pas d’avoir le même mode d’organisation.

La Brouette Coop se compose de six actifs dans le bureau et de plusieurs centaines d’adhérents. La Mandale elle n’est gérée que par le trio Baptiste, Mathieu et Martin. Toutes les décisions doivent être votées et acceptées à l’unanimité dans les deux structures.

Le trio de choc étant hyper actif, ils ont eu la bonne idée de s’associer avec d’autres associations des côtes de Meuse afin d’organiser un festival annuel du nom de Sotrés et Potailloux.

Sotrés signifie petit lutin lorrain et Potailloux c’est l’ancien nom que l’on donnait aux habitants de Chaillon qui était un village de potiers.

Pour plus d’informations je vous invite à visiter leur site web ici.

Pour créer encore plus de connexions, la Brouette Coop ouvre tous les mercredis soir à partir de 17h un bar associatif dans leur local où l’on y sert de la Mandale à la pression. Cet événement est l’un des plus importants dans la vie de la Brouette Coop. C’est un moment d’échange et de partage, une grosse partie des adhérents se retrouvent tous les mercredis cela entretient un lien fort entre l’association et ses adhérents mais aussi entre adhérents. Certains parcours plus de 30 km spécialement pour cet événement.

Enfants, parents et grands parents se retrouvent ici pour passer un agréable moment, c’est vraiment le rendez-vous de la semaine. Il y a un côté très social qui dépasse le cadre du village et de la simple rencontre à la boulangerie. La Brouette Coop rayonne à plus de 30 km autour de Chaillon et propose un moment d’échange décomplexé durant lequel les langues se délient.

Mon séjour à la Brouette Coop

Me voici débarquant un mercredi soir, deux heures avant l’ouverture du bar associatif. Autant vous dire que je n’ai pas eu le temps de prendre mes repères. Qui sont les résidents à la Brouette ? Qui est coloc ? Comment fonctionne le lieu ? Et c’est quoi ce rendez-vous au bar asso ?

Pas le temps de dire bonjour à l’ensemble des habitants de la Brouette que je me retrouve à porter des palettes pour faire de la place sur le parking afin de garer mon camion. 17h le bar ouvre ses portes, les adhérents arrivent par petits groupes de trois voir quatre personnes. C’est l’occasion pour moi de découvrir les habitants de la région et les Woofers de la Brouette.

Je vais me chercher un demi de Mandale au bar, brune de préférence et je commence mon tour des présentations. Après quelques heures je remarque qu’un groupe de personnes fait bande à part autour d’une table dans le jardin. Par curiosité je demande à Baptiste qui sont ces personnes et j’apprends que dans le coin la Brouette Coop n’est pas la seule association à dimension écologique et sociale. Les quatre individus n’étaient pas moins que les fondateurs de Mirabio, une entreprise à taille humaine qui a pour vocation de produire des mirabelles en agriculture biologique et autres produits transformés. La région est connue pour ses mirabelliers, personnellement je ne savais pas que c’était leur spécialité.

L'équipe de Mirabio en réunion au bar associtif de la Brouette Coop
L'équipe de Mirabio en réunion au bar associtif de la Brouette Coop

Cette soirée m’aura aussi permis de faire la connaissance de l’ensemble des résidents à la Brouette. Actuellement il y a cinq habitants à l’année : Adrien, Caroline, Kurt, Martin et Baptiste. Mathieu a déménagé récemment pour s’installer dans le village voisin avec sa femme et leur enfant.

S’ajoute à cela Valer et Rose qui sont en transition puis Jordan en woofing. Au final nous étions 9 à vivre à la Brouette.

Pour comprendre au mieux le fonctionnement de leur habitat groupé j’ai décidé de rester trois jours. Nous voici le deuxième jour, première mission, la mise en bouteille de la Mandale, environ 1000 litres de bière à mettre en bouteille en quelques heures. C’est du sport que de mettre environ 1400 capsules. Un vrai savoir faire que je découvre en même temps. J’avais déjà brassé de petites quantités à Lyon avec Simon et Maxime mais là c’est tout autre chose.

Les jours suivants s’enchaînent très rapidement avec un premier chantier, le déplacement de la terrasse et de la table à manger extérieure. Pour ce faire il fallait déplacer un tas énorme de ferraille d’un point A à un point B. Puis un second chantier plutôt amusant : destruction de vieux meubles en bois à la masse pour récupérer des planches. Le recyclage c’est important. Un vrai défouloir pour Thomas et moi. Y a comme quelque chose de jouissif d’éclater à coup de masse des meubles.

C’est cool de filer un coup de main sur l’aménagement de l’espace de vie, mais je voulais aussi découvrir le côté potager et serre du lieu alternatif. Je m’adresse donc directement à l’expert, Kurt, il m’explique rigoureusement toutes les espèces de plantes et aromates qu’il a planté. Le plus surprenant fut de retrouver du génépi dans le jardin. En ayant reproduit le biotope d’origine du génépi, Kurt a réussi à l’introduire en Meuse.

Le génépi en bouture sous la petite serre (Au fond en vert clair)
Le génépi en bouture sous la petite serre (Au fond en vert clair)

Après cette belle visite des serres et des potagers, j’avais comme mission de désherber la grande serre à légumes au chalumeau. Pas très écolo mais apparemment c’est la meilleure technique pour éviter la repousse des mauvaises herbes sans utiliser de pesticides.

Une fois le désherbage terminé, je poursuis avec la cueillette pour le repas du midi. Salades, rhubarbes et radis pour agrémenter notre repas.

On ne s’ennuie pas à la Brouette Coop, le lendemain avec Jordan et Kurt on se prend d’une envie d’améliorer le gros poulailler. Une petite poule bien maligne se faisait la malle en volant au-dessus du grillage. Pour remédier à cela on décide de tirer des ficelles sur le dessus de l’enclos pour former un gros quadrillage. Cela semble fonctionner il faut voir avec le temps si elle ne trouve pas une autre technique.

L’avantage d’avoir un poulailler c’est qu’il n’est plus nécessaire d’acheter des œufs. Il y a même un coq pour bichonner les poules, le coquin.

Petit poulailler sur la gauche
Petit poulailler sur la gauche

Une vie bien huilée à la brouette, le matin la majorité des résidents est debout à 8h. Personnellement j’ai gardé mon rythme et je me lève à 9h. Je croise généralement Kurt dans le potager en train de faire son petit tour d’inspection.

Les chantiers continuent, la nouvelle activité du jour c’est récupération des drêches du brassage du matin. Six brouettes pour vider l’ensemble de la cuve. On étale tout cela sur un séchoir géant fabriqué par Martin pour éviter une fermentation qui dégagerait des odeurs nauséabondes.

Une fois que les drêches seront bien sèches, elles serviront à nourrir les poules mais aussi de compost pour le jardin. En parlant de compost, le lieu est équipé de 2 toilettes sèches qui servent aussi de compost.

Il y a 6 composteurs de disponibles sur le terrain. Certains sont condamnés le temps de laisser le compost se faire et qui servira à fertiliser les potagers.

Maison à insectes et composteurs
Maison à insectes et composteurs

Neuf bouches sous le même toit ça demande une certaine organisation surtout pour les repas. À la Brouette c’est selon la motivation d’un des membres du groupe. J’avoue que j’ai souvent vu Jordan faire le cuisto. Les repas étaient toujours au top par contre certains ont une grosse consommation de viande. Il y a des vrais carnivores dans le groupe !

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L’imprévu qui fait plaisir

Par le grand des hasards je suis arrivé la semaine du festival privé le “Klotz”. Festival qui rassemble des centaines de personnes depuis 24 ans. Pour pouvoir participer il faut être invité par un membre du festival. Le mode de fonctionnement est simple, chacun apporte à boire et à manger et sur place on partage tout. De plus les organisateurs préparent quatre repas et des tireuses à bière sont mises à disposition. Une grosse Dame-jeanne est présente sur le comptoir, elle sert aux dons qui payeront les repas organisés et les consommations de bières.

À l’occasion de cet événement j’ai pu goûter le pâté de tête, une merveille culinaire, pas très appétissant au premier regard mais une fois qu’on a plongé sa fourchette on ne peut plus s’arrêter. Je remercie encore Nadège de m’avoir offert une conserve faite maison d’un succulent pâté de tête.

La vie du van

Durant mon voyage j’ai pu remarquer que mon véhicule faisait un bruit anormal sur les 2 roues arrière. J’en parle à la Brouette et Baptiste me recommande d’aller voir Edgard au village voisin (Creue). Là, je fais la rencontre d’un super garagiste qui prend le temps d’analyser le problème, de m’expliquer comment il va travailler dessus et cerise sur le gâteau il n’est pas hors de prix. Si vous avez un souci sur votre véhicule passez voir Edgard à Creue.

Conclusion

La Brouette Coop c’est plus qu’une simple association loi 1901, c’est un lieu de vie avec une dimension sociale forte, qui rassemble toutes les tranches d’âges. Où des amitiés naissent et perdurent. Où le troc se met doucement en place et de nouvelles initiatives émergent.

Depuis l’arrivée de la Brouette dans le village plusieurs autres initiatives sont nées. Maraîchage bio, arbres fruitiers, élevage… Chaillon devient progressivement un village alternatif. Bien-sûr comme dans toutes transformations, certains voient cela d’un mauvais œil. La différence fait souvent peur, laissons le temps à chacun de découvrir à son rythme les changements positifs qu’apporte la Brouette Coop au village.

Évidemment j’avais prévu de ne rester que trois jours le temps de faire mon reportage. Mais je me suis retrouvé comme aspiré par cette chaleureuse communauté et sans trop de surprise j’ai passé deux semaines en leur compagnie.

Si vous cherchez de bons produits dans la Meuse, la Mandale, Mirabio, un éleveur de viande bio et la chèvrerie bio du village se sont associés pour créer un seul point de vente qui rassemble tous leurs produits à Chaillon (La chèvrerie à l’entrée du village). Je vous invite fortement à faire vos emplettes chez eux.

Il y a encore tellement à raconter sur la Brouette Coop mais le mieux c’est de passer les voir, faire un peu de woofing et de revenir avec pleins de paillettes dans les yeux.

L’avant après

Pour mieux comprendre le changement je vous ai concocté un montage photo avant-après.

Le jardin avant et après
Le jardin avant et après
L'entrée avant et après
L'entrée avant et après
Ancienne terrasse avant et après
Terrasse avant et après
La nouvelle terrasse avant et après
La nouvelle terrasse avant et après

Des photos prisent depuis un drone.

La vidéo depuis le drone.

Vidéo depuis le drone de l'ensemble du lieu
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Rony Dray

Après huit années de carrière en tant que Freelance spécialisé dans le développement web et e-commerce, j'ai décidé de faire pivoter mon activité et de devenir Digital Nomad. Depuis fin 2017 je parcours la France en van aménagé dans le but de mettre en lumière des habitats partagés et des lieux alternatifs.